Philippe Duchesne

Philippe Duchesne

Vice-président en charge de l’offre Agile FACe (Financial Agile Center of excellence) – CGI

L’agilité ne se résume ni à des exigences gérées dans un Product Backlog, ni à des PI Plannings, ni à une organisation en Trains / Tribes / Squads… 

C’est avant tout un changement de culture, de paradigme, un levier stratégique pour repenser en profondeur la manière dont l’entreprise délivre de la valeur, innove, et engage durablement ses équipes.

Si la plupart des grandes entreprises ont expérimenté des approches agiles, rares sont celles qui ont réellement franchi le cap d’une transformation à l’échelle. Pourquoi ? Parce qu’elle remet en cause des modèles historiques bien ancrés. Pourtant, le coût de l’inaction est désormais supérieur à celui du changement.

Pourquoi la transformation agile est-elle devenue incontournable ?

L’agilité à l’échelle n’est pas une tendance passagère. Elle répond à des tensions structurelles que vivent de nombreuses organisations, notamment dans les secteurs de la banque, de l’assurance et des services.

1. Time to Market : aller plus vite, ou perdre du terrain

Le premier moteur de la transformation agile, c’est la capacité à accélérer la mise sur le marché des produits. Or, les organisations sont encore trop souvent ralenties par des silos (IT, métiers, MOA, marketing, etc.), qui travaillent en série en ayant des objectifs limités à leurs périmètres et non au produit dans sa globalité. La DSI, bien souvent, de part son organisation verticale en départements interdépendants éloignés du business, est à elle seule un ensemble de silos bien ancrés.

Le “cost of delay”, issu du lean, devient alors critique : chaque semaine perdue est une opportunité manquée. L’agilité permet de casser ces silos, au profit d’équipes stables, multidisciplinaires et autonomes, pour peu que l’on parle d’une réelle transformation et non d’une transposition d’une organisation en place (départements vers Tribes, services vers Squads), comme c’est malheureusement souvent le cas.

La vision, le pilotage par la valeur et la logique produit (MVP, MMP , etc.) permettent alors de livrer ce qui compte, au bon moment.

Objectif : livrer plus vite, et surtout mieux.

2. Satisfaction client : de la conception en chambre à l’usage réel

L’agilité recentre l’organisation sur l’expérience utilisateur :

  • Les métiers sont impliqués à tous les niveaux, de la stratégie à l’opérationnel, sur l’ensemble du cycle de vie du produit.
  • Les rôles sont clairs : Product Manager, Product Owner, Business Analyst, etc. et garantissent une continuité entre vision et exécution.
  • Le client final, ou le collaborateur en contact, devient le référentiel pour la prise de décision et la priorisation des exigences.

Objectif : créer des produits réellement utiles, adoptés et différenciants.

3. ROI : piloter les investissements par la valeur

Un modèle agile permet une gestion des investissements plus réactive et plus efficace :

  • Une mise en production plus rapide accélère la génération de revenus.
  • Le focus sur les fonctionnalités à fort impact optimise les budgets.
  • Les équipes “Build & Run” réduisent les coûts de maintenance grâce à une meilleure continuité.

Objectif : maximiser le retour sur investissement sans alourdir la structure.

4. Innovation : du test & learn à l’innovation intégrée

L’agilité est naturellement compatible avec la dynamique d’innovation :

  • Le test & learn est un socle du modèle agile.
  • L’organisation par itération permet d’intégrer rapidement de nouvelles technologies (IA, APIs, etc.).
  • Le modèle des trois horizons de McKinsey (évolution continue, développement produit, disruption) est facilement intégrable dans les différents framework Agile.

Objectif : faire de l’innovation un réflexe, pas une exception.

5. Attractivité et engagement : l’agilité comme moteur de fidélisation

L’agilité répond aux attentes profondes des nouvelles générations :

  • Sens, autonomie, feedback régulier, progression : les attentes RH sont en phase avec les pratiques agiles.
  • Les rituels (PI planning, démos, rétrospectives) renforcent la clarté stratégique et l’engagement collectif.
  • Les parcours professionnels sont repensés autour de rôles à forte valeur ajoutée.

Objectif : attirer, développer et retenir les talents dans la durée.

Les 4 points clés pour réussir une transformation agile à l’échelle 

1. Un sponsorship actif et assumé du COMEX et l’implication réelle des métiers

La transformation doit être portée par une vision d’entreprise, qui ne peut être, bien sûr, incarnée que par ses dirigeants. Une des premières missions du Comex est de partager cette vision à tout l’écosystème, afin de donner du sens au travail de chacun et chacune dans l’entreprise. Elle ne peut être portée uniquement par l’IT, comme c’est trop souvent le cas : cela entraine une ambigüité sur la participation des métiers. Or qu’est-ce que l’agilité sans des métiers impliqués ?

  • L’agilité ne peut fonctionner sans une présence forte et constante des métiers.
  • Ils doivent être acteurs de bout en bout : formulation des besoins, arbitrage de la valeur, validation de l’impact.

La transformation n’est pas un long fleuve tranquille : son succès dépend en partie du soutien indéfectible du COMEX dont chaque membre doit incarner les nouvelles valeurs induites par l’agilité, également les nouvelles postures. Elle doit être connectée aux objectifs stratégiques de l’entreprise pour les servir, et aux OKRs stratégiques lorsqu’ils sont en place. Et qui définit les objectifs stratégiques dans l’entreprise ? La Direction générale bien sûr.

2. La DRH comme co-pilote stratégique

La DRH n’est pas un soutien périphérique : elle est partenaire de la transformation. Elle pilote la refonte des rôles, l’évolution des fiches métiers, les impacts contractuels et les trajectoires de carrière. Elle est aussi garante de la diffusion de la culture agile et de la conduite du changement, en accompagnant l’évolution des postures managériales et collectives.

3. Une organisation agile conçue à partir des chaînes de valeur

Transposer les anciens départements dans une structure agile (Département à Tribe et Service à Squad), sans repenser l’organisation, mène à l’échec car les dépendances multiples des organisations classiques tuent le time to market. Or, un des premiers principes de l’agilité réside dans l’autonomie des structures à pouvoir délivrer leurs engagements. Jeff Sutherland, un des pères du manifeste agile, disait : « une squad, c’est une équipe auto organisée, pluri disciplinaire et autonome » ; ce principe en Agile à l’échelle reste valable et doit également être appliqué au niveau de la Tribe.

La réussite passe par une construction centrée sur les chaînes de valeur, donnant aux équipes agiles l’autonomie nécessaire à la réalisation des fonctionnalités dont elles ont la responsabilité. C’est un changement de culture managériale : les leaders ne protègent plus un périmètre, ils font grandir des équipes orientées valeur et impact. Ne pas le faire revient à faire du Mode Projet en méthode Agile, et donc à ne pas atteindre ou très partiellement la promesse de valeur de l’agilité à l’échelle, alors que l’objectif est de passer en Mode Produit.

4. Un modèle de financement capacitaire basé sur la valeur

Financer des équipes, pas des projets : c’est l’un des changements les plus structurants, souvent le dernier mis en place, quand on devrait s’en préoccuper dès le début de la transformation. L’idée est de financer des Tribes / Trains annuellement (change/build et run), et de mettre en avant le pilotage de ce budget par la valeur des réalisations effectuées, et non plus des projets, au cas par cas. Bien sûr, disposer d’un budget annuel n’est pas une autorisation à le dépenser sans contrôle, et cela implique donc des revues budgétaires régulières, un pilotage par le backlog, et une autonomie de décision sur les priorités produit. C’est le rôle dévolu au Lean Portfolio Management. Le financement doit être dynamique et dans une certaine mesure révisable (4ième principe du manifeste Agile) à l’occasion de revues trimestrielles, afin de coller au mieux aux changements de priorités qui peuvent intervenir en cours d’année fiscale.

En conclusion : une transformation exigeante, mais à forte valeur ajoutée

La transformation agile à l’échelle est une réinvention en profondeur de l’entreprise qui touche tout à la fois à l’organisation, à la culture, aux rôles, aux outils et à la manière de délivrer. Mais c’est aussi un vecteur puissant de création de valeur, pour les clients, les collaborateurs et les actionnaires. Depuis plus de 10 ans, les équipes de CGI conseillent les organisations du secteur financier sur les transformations agiles et ont accompagné plus d’une dizaine de programmes majeurs, tant en consulting, pour matérialiser les nécessaires assets, qu’en coaching pour faire monter en maturité leurs collaborateurs.

Nos clients nous font confiance !  

Découvrez comment CGI a accompagné un acteur mutualiste, leader de la protection sociale en France dans sa transformation Agile à l’échelle de l’entreprise

A PROPOS DE L'EXPERT

Philippe Duchesne

Philippe Duchesne

Vice-président en charge de l’offre Agile FACe (Financial Agile Center of excellence) – CGI

Philippe Duchesne est en charge des activités de développement de nos offres Agiles pour le secteur des services financiers à Paris.